Quelle histoire !

L’EJACULATION FEMININE DANS L’HISTOIRE

La reconnaissance de l’éjaculation féminine comme un phénomène naturel est en fait très ancienne. C’est plutôt l’ignorance dans laquelle nous sommes là-dessus à notre époque, soit disant moderne, qui est atypique.

Nous avons des témoignages et des traces de cultures très diverses qui attestent du caractère très naturel, et dans certains cas sacré, qui a été attaché à la cyprine et à l’éjaculation féminine.

Les grecs anciens et les romains pensaient que le liquide féminin était composé d’éléments donnant la vie, comme le sperme avec ses spermatozoïdes, et que c’était le mélange de ces deux fluides qui, mêlant leurs « graines de vie »,  donnait lieu à la création d’un nouvel être. Les romains appelaient le fluide féminin « liquor vitae » comme le sperme. Hippocrate croyait dans cette théorie, Aristote l’a questionnée en disant que le jus féminin ne servait pas à la conception mais à l’alimentation du foetus, donnant au seul sperme la caractéristique de contenir ces graines de vie. Galen, le père fondateur de la médecine, au 3ème siècle,  a affirmé lui que l’éjaculat féminin était nécessaire à la conception mais qu’il ne pouvait en aucun cas contribuer à la substantation du fœtus car la cyprine était un liquide trop « froid » et trop clair.

En Inde, ce « nectar des Dieux » était appelé « amrita » (littéralement : « nectar de lotus »). Il était vénéré comme un fluide érotique féminin sacré dans certaines régions. Au Xème siècle, la tradition spirituelle du Tantrisme est apparue en Inde centrale et orientale. Elle prônait la sexualité comme un moyen très puissant d’accéder à l’épanouissement spirituel. Le Tantrisme considère l’énergie sexuelle comme une manifestation de l’énergie cosmique que l’on peut apprendre à maîtriser et à développer à des fins spirituelles. Cette doctrine considère le liquide produit par l’éjaculation féminine comme ayant trois variations en qualité : le « suratham » ou « jus ressemblant au vin » ; le « sronithram » ou « liqueur à gouttes de sang » ; et le « suklam » ou éjaculat. Les enseignements tantriques recommandent de boire ces précieux liquides plein de vitamines, de minéraux et d’hormones bénéfiques, si possible directement « aux lèvres du yoni » à l’apogée du moment le plus intime de l’union. Cette pratique s’appelle l’ « amaroli ».

Le Kama Soutra est un traité sexuel hindou datant de plus de 2000 ans. Plusieurs chapitres y mentionnent l’éjaculation féminine. Dans le texte original écrit par le sage Vatsyayana on retrouve la même conception que celle des anciens grecs et romains considérant que la liqueur féminine contient aussi des graines de vie.

Depuis 2500 ans la tradition scientifique et philosophique chinoise du Taoïsme, considère l’éjaculation féminine comme sacrée et essentielle au processus vital de l’homme comme de la femme. Comme le Tantrisme , le Taoïsme distingue trois sortes d’ « eaux féminines » :

La Première Eau est le lubrifiant qui apparaît avec l’excitation sexuelle. Elle « approfondit l’eau et élargit la rivière ». Cela respecte une règle d’or sexuelle du Taoïsme : « Ne lance jamais ta barque sur une rivière rocailleuse ! ». Cette première eau est comparable pour les chinois aux « Gouttes de bonheur » qui apparaissent perlant de la verge chez l’homme comme signe d’excitation et prémisse de l’orgasme masculin.

La Deuxième Eau  est l’Eau de l’Excitation Supérieure, la montée vers l’orgasme. A ce moment  les taoïstes disent que « La rivière s’écoule ».

La Troisième Eau apparaît au sommet du plaisir. Elle vient compléter l’équilibre interne du Kan et du Li (l’eau et le feu) pour la femme et aussi pour le couple. C’est l’éjaculation abondante. A ce moment là : « La rivière déborde de son cours inondant les champs de sa manne créatrice de vie ».

Entre le XVIème et le XVIIIème siècle au Japon le mouvement artistique « shunga » a élevé les plaisirs sensuels et les délices sexuels en forme artistique florissante. De très nombreuses gravures de cette époque célèbrent les femmes fontaines de manière très explicite avec une grande minutie de détails. La cyprine était considérée comme une potion aphrodisiaque et régénératrice, capable de renverser le processus de vieillissement. On recueillait les précieuses liqueurs féminines dans des vases spécifiques appelés « harikata », équipés de godemichets en jade ou en ivoire appelés « heikonoinho ». D’autres instruments étaient faits de cornes de buffles creuses , remplies de lambeaux de soie pour recueillir la cyprine par imprégnation, et que la femme s’attachait au pied pour mieux se pénétrer elle-même et provoquer son éjaculation.

Le  liquide ainsi recueilli était ensuite chauffé avec de l’eau et dégusté comme une liqueur miraculeuse.

Pour la tradition shamanique Quodoushka de certains indiens d’Amérique, l’éjaculation féminine représente la capacité d’une femme à intégrer sa dimension masculine. Elle reconnaît aussi trois types d’Eaux féminines. Un rituel fascinant de cette culture consiste à permettre à la femme de transmettre l’immortalité à l’homme grâce à sa cyprine. Dans cette cérémonie sacrée l’homme et la femme font l’amour rituellement. L’homme éjacule dans le sexe de la femme. Celle-ci prolonge son excitation en venant ensuite s’asseoir sur le visage de l’homme allongé sur le dos. Il place ses mains en formant un triangle sur son ventre, elle place les siennes en formant un triangle aussi sur le sommet du crâne de l’homme. Elle éjacule alors dans sa bouche. Ainsi il la « reprend » en buvant son eau mélangée à son propre sperme. C’est ainsi que l’homme reçoit l’immortalité par ce « baiser de vie ». Quand la femme éjacule ainsi dans ce rituel, cela représente symboliquement sa force de vie projetée dans le monde et cela est relié à la création de l’univers selon la mythologie Quodoushka.

Dans la tradition celtique la connaissance est gênée par les traductions et censures exercées par les moines chrétiens qui nous ont transmis ces textes et contes en cherchant à les dénaturer. On pense néanmoins que la déesse Morrigan, qui a, dit-on, créé la rivière Samhain en urinant après avoir fait l’amour avec le dieu de la terre Dagda, l’aurait en fait engendrée en éjaculant.

Dans le Pacifique Sud, chez les Trukes dans les îles Corail,  et chez les Ponapé, continue de se perpétuer la culture de ce qu’ils appellent « l’aspersion du mur » qui encourage et respecte l’éjaculation féminine. Les Ponapé considèrent qu’ils ne peuvent pénétrer leur femme qu’après qu’elle ait propulsé ses eaux, favorisant ainsi sa fertilité.

Pendant des siècles les prêtres de l’Eglise Catholique ont été instruits de conseiller les couples de ne surtout pas empêcher l’épanchement masculin mais aussi féminin, sans doute pour préserver le but de procréation de la sexualité admise. Ainsi ils devaient lutter contre la pratique du « coïtus interruptus » mais aussi de la pratique moins connue de l’« amplexus reservatus » qui consiste à empêcher l’épanchement de liqueur de vie par les femmes comme par les hommes. Ceci remonte au Moyen Age mais on retrouve dans l’ « Acta Apostolicae Sedis » publiée le 30 juin 1952 par le Saint Siège du Vatican l’instruction suivante :

« Dans leur mission attachée au soin des âmes et à la direction de leur conscience, les prêtres ne devraient jamais, soit spontanément soit en réponse à une question, présumer de l’amplexus reservatus comme si il n’y avait aucune objection contre celui-ci du point de vue de la Loi Chrétienne »

Autrement dit, en termes un peu moins tordus, l’Eglise Catholique Romaine considère jusqu’à ce jour que c’est un péché pour une femme de NE PAS éjaculer !

Cela correspond encore de manière presque magique, à la permanence de la vision ancienne venant des grecs que la liqueur féminine est une semence.

On trouve l’expression de la perpétuation de cette croyance et le début de sa contestation au XVIIème siécle chez Voltaire. Dans L’Homme aux quarante écus, le jésuite Tomás Sánchez croyait « que les deux véhicules fluides de l’homme et de la femme s’élancent et s’unissent ensemble, et que dans le moment l’enfant est conçu par cette union », partageant en cela l’opinion d’Hippocrate. Il souleva ainsi une question théologique très cocasse qui peut se résumer, en latin, à : Utrum virgo Maria semen emiserit in copulatione cum Spiritu Sancto (« Est-ce que la Vierge Marie a émis une semence en s’unissant avec l’Esprit Saint ? »), ce qui expliquait scientifiquement comment la Vierge Marie avait pu enfanter tout en restant vierge : en éjaculant !

Voltaire, néanmoins, remarque qu’« il y a beaucoup de femmes qui ne répandent aucune liqueur, qui ne reçoivent qu’avec aversion les embrassements de leurs maris, et qui cependant en ont des enfants. Cela seul décide contre Hippocrate et Sanchez. » A partir de là la connaissance objective des mécanismes de la procréation a pu commencer…

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